La dysmorphophobie détermine le pronostic fonctionnel du trouble hyperphagique compulsif

Dans cette étude, les auteurs ont mesuré chez des femmes atteintes de BED l’indice de masse corporelle, le niveau de dysmorphophobie, et la fréquence des épisodes, et ils ont évalué de manière longitudinale le niveau de détresse psychologique et le retentissement psychosocial du trouble

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Dans les ouvrages pédagogiques de psychiatrie, les symptômes dits « cardinaux » de l’anorexie mentale sont souvent présentés comme étant l’anorexie, l’amaigrissement, et l’aménorrhée, liste que les étudiants en médecine, friands de moyens mnémotechniques, peuvent facilement retenir grâce au triple A (rien à voir avec Standard & Poor’s bien évidemment). Pourtant, ces trois symptômes n’ont absolument rien de spécifiques d’une anorexie mentale, et se voit dans toute cause potentielle de réduction d’appétit et même d’amaigrissement majeur. Les cliniciens chevronnés considèrent plutôt que c’est la dysmorphophobie, c.à.d. la perturbation de la représentation de l’image de son corps, qui est davantage pathognomonique de l’anorexie mentale.

Dans cette étude, qui ne porte pas sur l’anorexie mentale stricto sensu, mais sur le Binge Eating Disorder ou trouble hyperphagique compulsif, les auteurs ont mesuré chez des femmes atteintes de BED l’indice de masse corporelle, le niveau de dysmorphophobie, et la fréquence des épisodes, et ils ont évalué de manière longitudinale le niveau de détresse psychologique et le retentissement psychosocial du trouble. Ils ont montré à l’aide d’analyses multivariées que c’était le niveau de dysmorphophobie qui était le plus explicatif du pronostic fonctionnel global.

Bien que cet article ne porte pas sur l’anorexie mentale, il illustre en fait que parmi les patientes atteintes de BED, celles qui ont un profil « anorexique » dans la représentation de leur corps ont un plus mauvais pronostic fonctionnel, contrairement à celles qui n’ont pas ou qui ont peu de trouble de l’image corporelle. Au sein des troubles du comportement alimentaire, l’anorexie mentale est sans doute la pathologie qui le plus mauvais pronostic. C’est celle qui est caractérisée par le plus haut niveau de dysmorphophobie. Sans doute faut-il considéré que le nœud gordien de l’anorexie mentale n’est ni pas le triple A, ni même en soi le rapport à l’alimentation, mais plus la représentation particulièrement altérée que ces patientes ont de leur propre corps.

 

Par Benjamin Rolland

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