La nécessité de schémas de dose adaptés au patient pour de futures études sur le baclofène, sur le modèle des essais méthadone.

Dans un article paru dans la revue European Neuropsychopharmacology, des auteurs estiment au contraire que si certains essais n’ont pas réussi à montrer de relation dose-effet, c’est parce que l’efficacité et les effets secondaires du baclofène pourraient survenir à des doses très variables selon les individus,

Alcool

Les essais cliniques sur le baclofène ont eu des résultats mitigés, y compris à hautes doses, ce qui a amené certains hauteurs à conclure que l’utilisation du baclofène dans le trouble d’usage d’alcool devait être reconsidéré (Beraha et al., 2016). Dans un article paru dans la revue European Neuropsychopharmacology, des auteurs estiment au contraire que si certains essais n’ont pas réussi à montrer de relation dose-effet, c’est parce que l’efficacité et les effets secondaires du baclofène pourraient survenir à des doses très variables selon les individus, expliquant des arrêts de traitement plus fréquent lorsque les doses sont montées à une valeur fixe, ce qui est souvent le cas dans les essais cliniques.

 

Dans une lettre en réponse aux auteurs, nous rappelons d’abord que les données observationnelles sur le baclofène concluent beaucoup plus souvent à une efficacité des hautes doses. Or, contrairement à la plupart des essais cliniques, les études observationnelles utilisent des schémas de doses adaptés à chaque patient (« patient tailored »). Seuls deux essais cliniques randomisés ont utilisé ce schéma jusqu’à présent. D’abord l’essai allemand BACLAD (Müller et al., 2015), et l’étude BACLOVILLE de Philippe Jaury. Or ces deux études sont les deux seules qui ont retrouvé un effet positif du baclofène même si BACLOVILLE, même s’il faut rester prudent car BACLOVILLE n’a toujours pas fait l’objet d’une publication scientifique, ce qui empêche d’avoir accès à tout un tas d’éléments importants pour évaluer la solidité scientifique des résultats.

 

En France est née une utilisation « patient tailored » du baclofène, sur le modèle de l’utilisation d’autres traitements bien connus en addictologie, que sont la buprénorphine et la méthadone. Des hypothèses de « substitution » partielle de l’alcool par le baclofène ont d’ailleurs été proposées par plusieurs auteurs (p.ex. Chick et Nutt, 2012). Comme le baclofène, les traitements de substitution ont fait l’objet d’études à faibles doses dans le passé, et ils ne sont pas supérieurs au placebo à ces doses. De la même façon, des essais cliniques à dose maximale haute et imposée de méthadone (par exemple 300 mg/j pour tous les patients) aurait pour conséquence une mauvaise tolérance de nombreux participants, des sorties d’essais, et donc une absence d’efficacité démontrée de la molécule. Nous faisons l’hypothèse que ce problème est similaire pour le baclofène, et que des essais de bonne qualité avec des doses « patient-tailored » sont indispensables pour évaluer plus précisément l’efficacité et la tolérance du baclofène dans le trouble d’usage d’alcool, même si de tels essais posent des problèmes méthodologiques certains.

 

Selon nous, les résultats décevants de certains essais cliniques récents sur le baclofène ne devraient pas anéantir les perspectives thérapeutiques du baclofène dans le trouble d’usage d’alcool. Ces résultats pourraient surtout mettre en évidence des schémas de gestion de dose inefficaces, et pas nécessairement une efficacité insuffisante de la molécule elle-même.

 

 

Par Benjamin Rolland

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