“Euphoria“ Une série télévisée de Sam Levinson

Autres drogues

Cette adaptation de la série Israélienne Euphoria, diffusée en 2012, elle-même tirée d’une histoire vraie, donne l’occasion au réalisateur d’aller fouiner au plus près des aventures et préoccupations de cette génération Z née à l’orée d’un 21ème siècle qu’ils affrontent armes numériques dans une main, et béquilles psychoactives dans l’autre, en sachant bien que les unes et les autres peuvent se retourner contre eux…

C’est Rue, une ado de 17 ans qui nous sert de guide pendant ces huit épisodes d’une première saison. Elle nous éclaire à l’occasion sur son parcours et celui de ses petits camarades de classe qu’elle retrouve après un été mouvementé, en classe de Première… Le premier épisode donne le ton. Nous avons affaire à une série d’ado déconseillée aux moins de seize ans, où toutes les thématiques sensibles seront abordées sans détour, bien au contraire. Pas question de tourner autour du pot, mais plutôt d’y plonger avec beaucoup de curiosité pour aller chercher en profondeur ce qui anime l’âme de ces adolescents qui sont déjà si proches de l’âge adulte… Si Rue nous intéresse tout particulièrement c’est qu’elle lance la série sur la thématique des usages de psychotropes. Née trois jours après le 11 septembre, elle est diagnostiquée à la va-vite bipolaire à l’âge de 8 ans et commence alors un parcours médicamenteux qui se poursuivra jusqu’à l’adolescence. Les psychotropes comme mode d’adaptation au monde. En réponse à chaque nouveau trouble, un nouveau produit… L’entrée au lycée est l’occasion de consommer régulièrement cannabis, alcool, cocaïne et enfin Xanax à disposition dans la pharmacie familiale… Ses consommations sans limite lui occasionnent des black-out de quelques secondes, jusqu’au jour où elle fait une surdose plus sérieuse que les précédentes, chez elle, dans sa chambre, sous les yeux de sa soeur cadette. Elle en réchappe de justesse, et sa sortie d’hôpital sera suivie d’un séjour en “cure de désintoxication“. Elle y passe l’été avant sa rentrée en première. Mais pas question pour elle alors de renoncer aux usages. L’objectif : continuer à s’extraire de ce monde à l’occasion, et pour quelques minutes ou quelques heures…

La rencontre avec Jules, jeune femme transgenre, nouvelle venue au lycée, va changer la donne. Jules et Rue vont se lier d’amitié très vite et se soutenir tout du long. L’univers de Rue ne se limite bien entendu pas à sa désormais “meilleure amie“, mais à un ensemble de personnages, parmi ses pairs, qui vont planter le décor, faire avancer l’intrigue et provoquer des événements que Rue observe la plupart du temps de loin. Elle se met à distance de son monde pour ne pas qu’il l’impacte trop… La relation entre Jules et Rue finit par être exclusive. Mais Jules pose ses conditions. Elle ne veut pas d’une amie usagère car elle sait l’impact que cela peut avoir sur elle, et doit se protéger. Rue accepte, un peu contrainte et forcée, mais réussira malgré tout à tenir la distance. D’une dépendance aux produits, Rue passe à une dépendance sentimentale à Jules. On lui fait remarquer que son rapport à cette amie si proche, est du même ordre que celui qu’elle entretenait avec la drogue : l’obsession, l’exaltation, le manque… L’adolescente s’accroche à sa relation avec Jules comme à une bouée de sauvetage, mais ça fonctionne. Son abstinence tient…

Le sujet des usages de drogues devient presque incontournable quand il s’agit d’aborder la thématique adolescente. Comment imaginer qu’il en soit autrement quand on sait que le refuge psychoactif est une des voies explorée par beaucoup de jeunes, même si, contrairement à ce que pourrait laisser penser la fiction télévisuelle, tous les adolescents usagers, même à 17 ans, sont en minorité quand il s’agit de consommations dites “problématiques“. L’ensemble des thématiques explorées dans “Euphoria“, et qui sont inhérentes à cet âge si particulier, sont glorifiées en quelque sorte ici, parfois caricaturées, mais ont le mérite d’être abordées de front et sans se voiler la face… Une chose est sûre, contrairement à ce que pourraient penser certains, rien de mortifère ne ressort de cette fiction car ces ados sont pleins de vie, encombrés sûrement, pour beaucoup, par leur corps et l’agitation de leur cerveau, mais avec une force d’adaptation et un sens de la survie que l’on ne peut que leur envier…

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